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En matière de création artistique, on peut dire qu'on est libre de faire ce qu'on veut, c'est vrai bien sûr. Il n'y a pas d'obligation de se conformer aux canons à la mode, ou aux règles érigées. Mais peut-on pour autant faire n'importe quoi ? Peut-on ignorer ces règles ?
L'Art a cette réputation de s'opposer à toute règle. Est-ce à dire que l'art est anarchie ?
Peut-on faire des choses gratuitement, sans se soucier de ce qu'elles ont comme influence sur le récit ? Faut-il au contraire tout penser, repenser, vérifier et corriger, en terme d'efficacité de narration ?
On peut trouver des tas de recommandations sur la façon de faire une bd: il y a des règles pour la perspective, pour l'utilisation du nombre d'or, la règle des trois tiers, on peut apprendre comment placer la ligne d'horizon, comment utiliser les couleurs chaudes et froides en opposition pour donner de la profondeur à une image, on peut apprendre l'impact des contrasts, apprendre à mettre en page ses images et ses textes pour guider le lecteur, l'anatomie, pour savoir construire un corps qui tienne debout et qui soit quelque peu crédible,...
La gratuité d'un délire apporte parfois un peu de fraicheur dans ce monde de rigueur. Mais où trouver son équilibre entre cette liberté et la nécessité d'avoir un récit lisible, en accord avec son contenu ?
Quelques pistes:
ò Peut-on changer le sens de lecture à sa guise ?
ò Briser les règles / suivre les règles / transcender les règles.
ò Connaître ces règles, est-ce un gage de succès ?
ò Le progrès et la performance sont-ils nécessaires ?
ò ...sur bda ?
ò Des règles au service d'une idée ? (voir ci-dessous).
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Des règles au service d'une idée.
On m'a dit que dans les écoles de scénario américaine, les scénaristes apprennent que chaque scène doit répondre à un de ces deux critères: faire avancer l'intrigue ou en apprendre davantage sur un personnage. Toute autre scène est inutile et doit disparaitre. Ceci, afin d'optimiser la durée du récit, de maximiser l'importance de chaque moment. Chaque scène est indispensable au récit, et ne peut pas en être retirée sans changer le sens de celui-ci.
Pas étonnant alors que les productions soient généralement des films d'actions, et que plus il y a d'actions, moins les personnages sont profonds.
? l'inverse, au japon, on décompose les mouvements, on fait de longs plans fixes où il ne se passe rien, on prend son temps,... Il ne se passe rien pendant la plus grande partie d'un récit. Mais comme on attache autant d'importance au pleins qu'aux vides, les scènes d'actions sont très dynamiques par contrast.
La ligne claire a elle aussi ses règles, dont le but est de maximiser la lisibilité. Extrait de wikipédia:
Les principales caractéristiques du graphisme élaboré par le dessinateur de Tintin ont été depuis longtemps dégagées, notamment par Hergé lui même :
ò contour systématique : trait noir, d'épaisseur régulière, identique pour tous les éléments du dessin (personnages, vêtements, décors) ;
ò couleurs en aplats : pas d'effets d'ombre et lumière (même de nuit, cf. par exemple L'Affaire Tournesol, p.7-10 : la direction de la lampe de poche n'influe pas sur l'éclairage des éléments du dessin). Les effets d'ombre par hachures sont également évités par l'auteur de Tintin.Mais on peut ajouter à cela d'autres éléments systématisés par Hergé, dans le même but permanent d'améliorer la lisibilité de l'£uvre :
ò réalisme des décors ;
ò régularité des strips (peu de débordements d'images sur plusieurs strips ou de modification de taille des strips d'une page sur l'autre...), chaque case est elle-même entourée d'un trait simple ;
ò unité et continuité des plans (pas de changement de plan d'une case à l'autre pour des raisons purement "esthétiques") ;
ò enfin, il ne faut pas oublier que Hergé est aussi, avant toute chose, un maniaque du scénario parfait, et que le dessin se met, pour lui, au service du récit. D'où un usage très large de l'ellipse, et la suppression presque totale de toute forme de récitatif.
Un procédé a-t-il plus de valeur qu'un autre ? Non, bien sûr, pas pour le lecteur. Pour l'auteur, par contre, c'est très différent. Tout dépend de la manière dont il veut raconter les choses. Un auteur aura interêt à choisir les règles qu'il veut suivre (voir à les créer) selon les buts qu'il se fixe, selon le style qu'il veut adopter.
Dernière modification par Dr_Folaweb (07/06/2007 00:12:43)
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Un peu fatigué pour en débattre maintenant , mais ton deuxième post sur les scénarios est très intéressant et donne envie d'en savoir plus ...
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Un procédé a-t-il plus de valeur qu'un autre ? Non, bien sûr, pas pour le lecteur. Pour l'auteur, par contre, c'est très différent. Tout dépend de la manière dont il veut raconter les choses. Un auteur aura interêt à choisir les règles qu'il veut suivre (voir à les créer) selon les buts qu'il se fixe, selon le style qu'il veut adopter.
T'a déja répondu pour moi
Après à chacun de trouver son équilibre.
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Un peu comme Malcom, tu as déjà posé les bases de pas mal de réponses.
J'aurais aimé ajouter un truc cependant : Pour pouvoir être véritablement libre dans la création et se jouer des règles, il faut déjà non seulement les connaître mais également les maîtriser.
Les plus grands peintres abstraits avaient une technique irréprochable et la pluspart des oeuvre bédéistiques que j'adore avec un style très libre sont en faite réalisées par d'excellents dessinateurs.
Donc pour moi l'art n'est pas la volonté de s'opposer à toute règle, mais bien le choix libre de l'application ou non de certaines d'entre elles.
Ce qui impliquerait que le sens de lecture doit avoir une réelle signification pour celui qui le change, que qui veut faire sortir des éléments des cases doit déjà savoir comment dessiner à l'intérieur, que les règles sont bien au service d'une idée.
On pourrait même dire que du coup, le fait de renoncer à une règle est en soi une règle. Par exemple : Je ne veux pas respecter l'anatomie et avoir de grosses têtes pour mes personnages, je me crée une règle de construction et m'y tiens.
Finalement, tout création est au moins soumise aux règles qui ont décidé de sa mise en oeuvre.
***
Le progrès et la performance : Ils sont à mon sens nécessaires pour un artiste. Pour avoir une oeuvre plus parlante, il doit prendre en compte ses erreurs passées et s'améliorer.
Sur BdA également, j'y viens aussi (de temps en temps) pour progresser.
Les règles seraient pour moi une sorte de guide pour savoir là où j'ai faiyt une erreur en les transgressant et là où j'ai eu raison de les transgresser.
Un révélateur plutôt.
Hyenne, passioné
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c'est une bonne question ! l'art est la volonté d'expression ce que l'on ressent en soi, et ca ne peut se faire pleinement et complétement qu'en oubliant ce que les autres vont en penser et comment ils te jugeront, bref il y a un peu d'anarchie là dedans.
Le jugement est la base de tout conflit et pour moi, l'oeuvre de tout artiste est valable puisqu'elle vient d'une émotion, d'une envie de transmettre qq chose à d'autres personnes, bref, de communiquer. Il n'y a pas de régles à suivre, chacun doit suivre sa voie.
Aprés, les techniques artistiques de base sont utiles à l'artiste comme l'éducation est utile à un enfant, elles lui permettent de s'assumer et de développer une autonomie qui lui permettront ensuite de voler de ses propres ailes, de s'affirmer au travers d'un style et d'une identité propre. c'est pas facile à faire mais c'est le passage obligé vers la vrai libération.
je vous rassure, je suis pas en train de léviter...
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