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Arrivé sur BDA au début de l’année 2008, Pain(t)
s’est vite imposé comme un auteur incontournable du site. Son univers plein d’humour et de poésie nous charme régulièrement. Impossible de ne pas chercher à en savoir davantage … |
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Pour commencer, un petit mot sur ton pseudo :
pourquoi pain(t) ? |
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Quand et à quelle occasion as-tu réalisé ta première bande
dessinée ? Je crois que mes toutes premières datent de mes 6 ans. Elles abordaient déjà des sujets très sérieux et engagés comme le foot ou la baston entre des ninjas et des zombis…. Sinon, mes premières vraies BD « abouties » sont vieilles d’à peine un an. J’avais élaboré une petite série d’histoires courtes et muettes, réalisées sous Paint donc, à propos d’un homme, Jean, à qui il arrive des malheurs avec des objets du quotidien (ses escaliers, des réverbères, une boîte, …). As-tu reçu une formation particulière ? Non, aucune, à part la formation très répandue du « dessin sauvage au fond de la classe » tout au long de ma scolarité… |
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Depuis que tu fais de la bande dessinée, as-tu rencontré des
personnes qui t’aient conforté dans ce choix ? Des professionnels, d’autres
amateurs, des lecteurs ? Honnêtement c’est grâce à BDA et évidemment à ses utilisateurs que je me suis sérieusement lancé dans la bande dessinée et que je continue encore. Je ne dis pas ça pour être gentil, c’est réellement le cas, et je suis sûr que de nombreux membres du site sont dans ce cas-là. On a ici la chance rare de recueillir à la fois des commentaires encourageants et motivants sur nos travaux, et des critiques constructives qui nous permettent de sans cesse progresser et nous remettre en question. On ne peut donc que progresser tout en se faisant plaisir. Au stade où tu en es aujourd’hui, quelles sont tes aspirations en matière de bande dessinée ? Mon but est uniquement de continuer à progresser en me faisant plaisir. Sinon, comme je déplore le côté solitaire de la bande dessinée, j’aimerais beaucoup m’impliquer dans des événements collectifs en matière de BD (adhérer à une association de BD, participer à des petits stands dans des festivals, collaborer à des fanzines, etc…). Enfin, rencontrer du monde quoi, en vrai ! Mon rêve serait de trouver ou créer un atelier d’amateurs dans ma ville, un endroit où se retrouver entre dessinateurs pour travailler sur nos projets… Cela doit être très sympa j’imagine. Mais là vraiment c’est de l’utopie dans mon cas (avis de recherche : j’habite Montluçon, faîtes-moi signe !). |
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« Si je savais dessiner comme un dieu, est-ce que mes histoires seraient plus compliquées avec plein de trucs super durs à dessiner dedans ? » |
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Est-ce l’histoire ou le graphisme qui te sert de guide ? Considères-tu que l’un a plus d’importance que l’autre ? Dans mon cas, c’est évidemment l’histoire qui me sert de fil conducteur. Je fais de la bande dessinée avant tout pour raconter une histoire et non pour mettre en avant des talents graphiques, que je n’ai d’ailleurs pas… La bande dessinée est un art complet et complexe : elle requiert une bonne histoire ET un graphisme attrayant. On peut même ajouter à cela que le graphisme et l’histoire racontée doivent être en adéquation. En tant que lecteur, combien de fois ai-je feuilleté des BD au graphisme extraordinaire avec un scénar tout bidon… et inversement. Pour ma part, en tant que lecteur, l’histoire prime légèrement sur le graphisme. Un bon exemple serait les bandes dessinées de Parrondo, qui utilise un style de dessin ultra simpliste mais servant des histoires mignonnement abracadabrantes. Mais là encore, le point fort de cet auteur est que son graphisme est en parfaite adéquation avec ses histoires. |
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Tes premières histoires étaient des récits courts. Tu utilisais un
graphisme très dépouillé. Pourquoi ce choix ? Tout simplement parce que je travaillais avec le logiciel Paint qui est ultra limité et qu’en plus je ne savais pas du tout dessiner ! J’avais surtout des histoires à raconter, le graphisme était, pour le coup, vraiment relayé au second plan. J’étais d’ailleurs plus dans l’histoire illustrée que dans la bande dessinée (les textes étaient séparés des cases, celles-ci ne contenant aucune bulle) De plus, les histoires que j’avais envie de poser sur le papier ne nécessitaient pas un dessin très développé et j’arrivais à m’en tirer et être suffisamment compréhensible avec des bonshommes en fil de fer. C’est d’ailleurs toujours le cas, même si mon dessin a un peu progressé depuis. En fait, la question est : « Si je savais dessiner comme un dieu, est-ce que mes histoires seraient plus compliquées avec plein de trucs super durs à dessiner dedans ? ». Pas sûr… Même si parfois je suis obligé de me débrouiller avec mes maigres talents de dessinateur pour arriver à rendre à peu près sur papier ce que je veux montrer, il est probable que mon dessin très minimaliste est indissociable des histoires que j’ai envie de raconter.. |
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Tu t’es ensuite lancé dans « Billy’s book ». Le premier tome compte plus de soixante planches et le second est en cours. Qu’est-ce qui t’a donné envie de partir ainsi dans cette grande aventure ? A force de traîner sur BDA et de lire de plus en plus de bandes dessinées, je me suis dit qu’il fallait que je progresse et que je me lance plus sérieusement. J’avais aussi envie d’abandonner le logiciel Paint et de dessiner sur du papier (ce qui est pour moi maintenant un plaisir incomparable). Je me suis ensuite demandé comment procéder : produire des strips ou des petites histoires de quelques planches, ou me lancer dans une grande saga ? Je me suis alors largement inspiré (à mon niveau) ce qu’avait tenté Trondheim avec ses « carottes de Patagonie » : mon objectif était de partir d’une case et de me laisser aller spontanément au fil des planches. Bon, lui en a fait 500… mais quand même, l’expérience a été très enrichissante. Je me suis posé devant une feuille et j’ai gribouillé spontanément la toute première case : un bouc qui fait le guet sur un rocher (ne me demandez pas d’où cela sort… aucune idée !). Ensuite, j’improvisais planche par planche jusqu’à la dernière sans savoir vraiment où j’allais. Mon problème était que je ne me voyais pas réaliser un story-board de 60 pages et tout programmer à l’avance… et je ne le fais toujours pas ! Je pense que là où j’y gagnerais en « professionnalisation du travail » (un scénario plus béton, un meilleur découpage des scènes, des meilleures compositions des planches,…), j’y perdrais en spontanéité et plaisir personnel. J’aime bien le fait d’être à la fois auteur et lecteur de mon histoire, cela me permet de rester motivé à la faire avancer. Mon objectif en me lançant dans cette histoire de longue haleine était vraiment de progresser graphiquement mais aussi techniquement. Mais comme je ne voulais pas non plus affronter plusieurs problèmes délicats à la fois, j’ai opté pour des choix qui m’ont ensuite libéré de certains poids. Par exemple, j’ai délibérément supprimé les bulles de mes planches pour ne pas avoir à gérer leur place dans l’espace de ma feuille. Ou encore, j’ai construis une sorte de pochoir en gaufrier pour tracer le contour des cases sur mon papier, m’imposant ainsi de travailler sur des planches invariablement composées de 3 lignes de 2 cases. Ceci m’évite pour l’instant d’avoir à me soucier de la composition des planches au niveau des tailles des cases et de leur agencement dans l’espace. Toutes ces contraintes m’ont donc permis de me concentrer sur divers points techniques à travailler, un par un (les personnages, les plans, la perspective,…). Je me suis aussi pas mal facilité la tâche en choisissant comme protagonistes des animaux (donc pas de mains à dessiner !), avec en plus un corps en patate et des membres en fil de fer (adieu les problèmes de proportion et de positions naturelles à retranscrire fidèlement). Je pense que j’en aurais vraiment bavé si j’avais tout affronté d’un coup… |
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« Ce qui me procure le plus de plaisir est de
voir une planche finalisée après des heures de dur labeur. »
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Peux-tu résumer les différentes phases qui composent ta manière de
travailler ? Je commence par tracer mes cases avec mon gabarit, puis crayonné en bleu, encrage au stylo-feutre noir, scannage et enfin retouches & toilettages sur ordinateur. A quel moment de ton travail te poses-tu le plus de questions ? As-tu le plus de doutes ? Je me suis imposé une sorte de bande dessinée hybride avec Billy’s Book : je raconte une histoire classique (situation initiale > événement perturbateur > situation finale) tout en fonctionnant sur un mode de type « strip », avec une chute plus ou moins humoristique à chaque page. J’essaie donc d’enchaîner les planches en faisant avancer l’histoire tout en tentant de leur apporter à chacune une note comique. C’est donc ce double objectif de mes planches qui me fait le plus douter : je dois trouver des chutes plus ou moins drôles à chaque planche tout en faisant progresser le scénario, en conservant un équilibre juste entre ces deux aspects. Qu’est-ce qui t’apporte le plus de plaisir ? Le plus de difficultés ? Ce qui me procure le plus de plaisir est de voir une planche finalisée après des heures de dur labeur. Les difficultés sont nombreuses et surtout techniques : perspectives, variation des plans, ombres, … |
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As-tu l’habitude d’utiliser un matériel particulier ou bien
travailles-tu avec ce qui te tombe sous la main ? Depuis quelques mois, j’utilise toujours le même matériel : feuille Bristol A4, crayon bleu, gomme, stylo-feutres Pitt de Faber Castell en trois tailles de pointes. Ces stylos ont littéralement révolutionné ma façon de dessiner, je ne suis pas prêt d’en changer je pense ! Quelle place occupe la technique dans ton travail ? Je ne sais pas… je ne me soucie de la technique qu’à partir du moment où son besoin se fait sentir. Je me retrouve devant une case difficile à dessiner pour moi, car appelant une technique que je ne maîtrise pas. Alors je me documente un peu, je fouille, je regarde des photos sur le net,… et puis au bout d’un moment, j’en ai marre et je la dessine en me disant « bah allez, faut bien faire des erreurs ! ». Et la fois d’après ça va un peu mieux. Surtout que je suis incapable de redessiner une case ratée, c’est plus fort que moi : je laisse toujours le premier jet. Cela provient plus d’une grande fainéantise de ma part que d’une auto-satisfaction, car plusieurs fois je me suis dit : « Oh boudiou que ce dessin est moche, tu devrais le refaire… nan je veux pas ! »… |
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Préfères-tu réaliser en couleur ou en noir et blanc ? Je travaille quasi uniquement en noir et blanc. Non pas que la couleur ne m’intéresse pas, mais je ne maîtrise aucune technique naturelle ou informatique… J’ai récemment acheté des crayons aquarellables et je tente parfois quelques trucs, mais vraiment, là y’a du boulot ! Sinon, en parlant de couleur, je travaille actuellement avec Mypreciousnico, membre BDA lui-aussi, à la colorisation de Billy’s Book premier du nom (bon, en fait c’est plutôt lui qui travaille héhé). Mais, je sens que l’on va aborder ceci dans 7 questions… Ta manière de travailler a-t-elle évoluée au fil du temps ? Disons que j’ai adopté quelques petits trucs qui me facilitent la vie et me font gagner du temps (le gabarit pour les cases et le bleu pour les crayonnés… des trucs tout bêtes mais auxquels je n’avais pas du tout pensé au départ. Mais pour le reste, non pas tellement d’évolution sur la manière de travailler. As-tu besoin d’un environnement, d’un dispositif particulier ? Il me faut de la musique ! Après, je suis assez léger niveau matériel : une feuille, deux trois stylos et hop. |
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Comment te viennent les idées ? |
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As-tu déjà travaillé avec des scénaristes ? |
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Aimerais-tu travailler avec d’autres auteurs ? Je collabore justement actuellement à l’écriture du scénario du collectif Coincoin 2 avec Jolamouche (évidemment), Normandart, Stoon et Jujube. Scénario qui sera ensuite soumis aux dessinateurs de BDA comme pour le précédent opus. Bon, on peut pas dire que je sois très productif pour le moment… mais l’expérience de l’écriture d’un scénario à dix mains, avec les propositions et retouches de chacun, est intéressante. Le mélange de nos univers propres peut créer quelque chose de surprenant ! A voir, y’a encore du boulot. Il faut que je m’y remette d’ailleurs à l’écriture de cette histoire ! RRRrrrrrrrraaaaaaah pourquoi le temps passe si vite… bouhouhou. Donc, pour répondre à la question, travailler avec d’autres ne peut que m’intéresser. Je pense qu’il est bien de partager cette activité qui est finalement la plupart du temps un plaisir solitaire. |
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Peux-tu nous dire deux mots sur ta collaboration avec Mypreciousnico ? Haha j’avais bien prédit cette question ! Nostradamus, gare à toi ! J’ai rencontré Mypreciousnico à l’occasion du petit jeu que j’avais lancé sur BDA : « Lancelot du lac Arte ». Il s’agissait d’un jeu purement textuel avec une case unique réitérée. Quelques BDA ont participé à ce petit jeu, mais Mypreciousnico a été incroyablement productif, tant est si bien qu’à la fin, nous n’étions plus que tous les deux à poster alternativement nos petits délires avec Lancelot et son « mauvais-moi ». Un jour, le webmaster de webamag m’a proposé de produire une planche pour un cadavre exquis sur son site. Comme j’avais remarqué que Mypreciousnico s’était inscrit en tant que coloriste sur BDA, je lui ai demandé gentiment avec moult courbettes qu’exige sa grandeur, s’il voulait bien coloriser la planche que je venais de faire pour ce CE. Puis, de fil en aiguille, le défi a été lancé de coloriser Billy’s Book dont la version noir et blanc venait juste d’être achevée. On a d’abord fait de nombreux brainstorming pendant lesquels nous cherchions à élaborer une ligne directrice quant aux couleurs à choisir, la technique à utiliser, et autres divers petits problèmes. Nous avons d’ailleurs tout de suite posté nos divers essais en couleur sur le forum de BDA, afin de recueillir un maximum d’avis. Puis, Mypreciousnico s’est lancé courageusement dans la colorisation des 65 planches, et il y est encore, héhé ! Il s’est d’ailleurs grandement perfectionné au fur et à mesure des planches. Là encore, cette collaboration est vraiment enrichissante. Non seulement d’un point de vue technique (j’ai pas mal appris sur la colorisation assistée par informatique en regardant les planches finalisées de Mypreciousnico), mais aussi par rapport aux nombreuses discussions que nous avons menées tous les deux lorsque nous réfléchissons à la meilleure manière de coloriser une planche. Et enfin, d’un point de vue relationnel, j’ai rencontré quelqu’un avec qui j’ai l’impression d’avoir pas mal de points communs, et notamment l’humour, ce qui est déjà beaucoup et souvent bon signe. De plus, travailler sur la colorisation des planches avec Mypreciousnico est un plaisir tant nous arrivons à nous mettre d’accord aisément. |
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« Je suis surtout attiré par les dessins « simples », j’entends par là des dessins qui ne sont pas dans le réalisme et qui laisse une grande place à l’imaginaire du lecteur. » |
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Lis- tu beaucoup de bandes dessinées ? Quels sont les
auteurs qui t’influencent ? |
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Quels sont tes projets à venir ? Je vais d’abord finir le deuxième tome de Billy’s Book. Je devrais ensuite me poser la question fatidique : continuer la série ou changer du tout au tout… comme je n’ai pas envie de trancher maintenant j’attends de conclure celle-ci. Sinon, Mypreciousnico s’est penché sur l’écriture d’un scénario biographique sur la vie de Giant Coocoo (celui du miel et les abeilles), dont il est fan. Il m’a proposé une collaboration. Je vais y réfléchir… |
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A suivre donc…Merci Mr pain(t) ! N'hésitez pas à visiter son site http://billysbook.webcomics.fr/page/billy-s-book-1#page | |||
Interview de Philippe Gorgeot |
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