Quand vous voulez...n'importe où... par michael couvreur

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Quand vous voulez...n'importe où...

Synopsis :Plus besoin de se suicider, programmez votre mort auprès d'une agence spécialisée.

je remet cette histoire en piste, elle n'est pas découpée mais lue en 3 mn.

Type de dessin recherché :

Scénario :
27.04.2009

« Promis, bébé, je te rappelle demain soir. Puisque je te le dis. Non, je bosse je t’ai dit.
Allez, sois mignonne, puce. Ciao. »
Flo range son téléphone dans son jean et se gratte le front. Toutes les mêmes, veulent jamais rien comprendre. Il jette son mégot et s’arrête. De son sac en plastique il sort une blouse d’infirmier qu’il enfile sur sa veste. Il met des lunettes de vue, se décoiffe et jette le sac par terre. Il se remet en route et ressort son téléphone.
« Sonia, salut c’est Flo, ça va ?…Tu peux me passer J.D. ?….Merci, ma belle…..J.D. ? J’y suis dans deux minutes, là. Y a pas de changements ?…Alors écoute c’est parfait, ça roule…
Je te verrais demain soir ?…Ok, ça roule…Ciao. »
Il débranche son portable, le range et sort un post-it rose de sa poche arrière. Il y jette un coup d’œil et le remet en place. Il traverse la rue en trottinant et s’arrête devant un grand bâtiment rose clair. RESIDENCE LES LILAS. Il regarde sa montre et entre dans le hall. Manifestement en grande conversation, l’agent de surveillance et la standardiste ne daignent même pas lever les yeux sur lui. « C’est ça, abruti, roucoule." Il prend à gauche et monte l’escalier. Devant lui une vieille dame s’est arrêtée sur la troisième marche. « Depuis combien de temps ? Si ça se trouve ça fait des heures qu’elle est là, mémé." Il l’évite et grimpe jusqu’au deuxième étage. Il longe le couloir et s’arrête devant la chambre n°27. Il frappe, attends un peu et entre.
« Bordel, ça pue." Allongé et sous perfusions le vieillard le regarde. Florent s’approche de lui et débranche l’arrivée d’oxygène. Les yeux du vieil homme s’agrandissent, mais il n’ouvre même pas la bouche.
« Avec les compliments de la Maison Preston, monsieur Valérian. Je me permets de vous souhaiter une agréable mort."
Il sort de sa poche un minuscule appareil, semblable à une petite lampe et le glisse derrière l’oreille gauche du moribond. Un léger bip lui arrache un petit sourire et d’un geste rapide il replace l’objet dans sa veste. Puis il prend son pouls en lui faisant un petit clin d’œil mais les yeux du vieillard sont déjà fixes. Il remet en place l’arrivée d’oxygène, pioche dans le paquet de bonbon à la menthe et quitte la chambre.





27.04.2009

-« Tu as fait quoi ? Attends, Véro, j’ai dû rater un truc, là. Tu peux répéter, s’il te plaît ? »
Martine repose sa vodka sur la tablette un peu trop brusquement et en renverse sur son paquet de cigarettes. « Et merde ! »
-« Calme toi, Martine, qu’est-ce que j’ai dit de si terrible ? »
-« Je rêve. Je suis en plein rêve, là. Ma meilleure amie, ma sœur, m’annonce qu’elle vient d’embaucher des tueurs pour la liquider et il faudrait que je trouve ça tout à fait normal ? »
-« Attends, d’abord c’est pas des tueurs… »
-« Quoi ? Mais appelle les comme tu voudras, ça sera toujours qu’une bande d’assassins ! »
-« Tu sais, jusqu’à maintenant, dans ma vie j’ai pas décidé de grand chose. Tous les trucs importants je les ai subis. Même mes gosses. Alors tu vois, là, j’ai la possibilité d’avoir le contrôle sur l’événement le plus capital de toute mon existence. Ma mort. Ma propre mort, tu comprends ? »
-« Non, pas vraiment, tu vois. »
-« Ah, tu ne vois pas ? Comment t’as envie de finir, Martine, dis- le-moi ? Complètement gaga et incontinente dans un hospice ou en soins palliatifs à l’hôpital ? Vas-y, dis- le- moi.
Et bien moi, je n’en ai aucune envie, tu saisis? Moi, ma mort je me la programme. Rapide et sans souffrances. J’ai fait appel à cette boîte parce que se sont des pros. »
-« Des pros ! Mais Véro ouvre les yeux, c’est la Mafia, ni plus ni moins. Tu viens de mettre un contrat sur ta tête et tu me regardes tranquillement en grignotant tes pistaches. Et puis tu dis que t’as jamais rien fait de bien dans ta vie alors que ça commence à marcher pour toi. Ton livre fait un tabac, t’es invitée à donner des conférences dans le monde entier, tu gagnes beaucoup d’argent. »
-« Justement, je profite de la vie et quand le moment sera venu… »
-« Mais enfin, on nage en plein délire, comment tu peux prévoir, des années à l’avance, que tel jour, dans tant d’années, t’auras envie de crever ?
Et comment ils pourront savoir où tu seras dans quarante ans ? Si t’as déménagé en Chine ? »
-«Regarde ». Véro relève ses cheveux et lui montre la petite étoile tatouée juste derrière son oreille gauche. « Et bien dans l’encre, il y a des molécules qui contiennent des implants de GPS, d’après ce que j’ai compris. Ils peuvent me localiser n’importe où dans le monde. D’ailleurs c’est leur slogan : « Quand vous voulez, n’importe où. »
Et puis je dispose d’un n° de téléphone qui me permet, n’importe quand et à n’importe quelle heure, de modifier la date. Mais une seule fois, par contre. Si demain je me fais renverser par un bus et suis condamnée à rester impotente toute ma vie, j’avance l’échéance et ciao. »
-« Mais ça reste atroce. Et pourquoi tu ne te suiciderais pas toi- même, tant qu’on y est ? »
-« Mais il faut pouvoir, et surtout en avoir le courage, tandis que là quelqu’un s’en charge gentiment à ta place. Sinon imagine autre chose. Imagine ton mec, ou ta fille, atteint d’une maladie grave et incurable. Essaye de te les représenter diminués, souffrant le martyre dans leur lit d’hôpital, et te suppliant de les aider à arrêter tout ça. Si, en désespoir de cause tu fais le choix de les débrancher tu deviens une criminelle, avec tout ce que cela implique, les cauchemars et la culpabilité en prime. Alors que si ton mec avait souscrit un contrat, il modifie la date et tu t’arranges pour ne pas être là quand les types de l’agence viendront lui rendre une petite visite.
Je sais que je te choque, mais tu vois, au cinéma, on plaint toujours le pauvre type qui se fait flinguer d’une balle dans la tête, alors que moi je dis que c’est finalement lui qui à le plus de chance. Ok il avait certainement encore de belles années devant lui mais il n’a absolument pas souffert. Pas d’accident douloureux, pas de mutilation, pas de maladie, même pas besoin de se suicider. Une balle dans le citron et tout est fini. »
-« Mais ce qui est affreux, c’est de savoir. Tu ne te rends pas compte mais comme tu t’y attendras, tes derniers mois à vivre vont être un vrai cauchemar. Et puis le jour venu, tu vas te lever tranquillement et attendre d’y passer comme un bœuf à l’abattoir ? »
-« Pas forcément, il y a des options. Tu n’est pas obligé de choisir une date exacte, mais une période. Moi, par exemple, j’ai choisi de mourir entre soixante-quinze et quatre-vingt-deux ans. A n’importe quel moment. D’après l’agence, en général, la plupart des clients ne font vite plus attention à leur tatouage puis finissent parfois par oublier jusqu’à l’existence d’un contrat souscrit il y a bien des années. Mais inconsciemment ou non ils auront vécu pleinement leur vie, profitant de chaque instant, libérés de la peur de mourir. »
Martine reste songeuse un long moment. Elle termine son verre puis lève enfin les yeux sur son amie.
-« Et ça t’as coûté combien ? »
-« vingt-mille euros. »




14.10.2056

Véronique souffle ses bougies et attends la fin des applaudissements.
-« Merci à vous tous. De tout mon cœur. »
Elle se rassied et remarque que sa coupe de champagne est de nouveau pleine.
Décidément, ce connard de La Potières tient absolument à me voir dérailler. Il faut toujours qu’il se débrouille pour me coller celui-là. Et puis on va encore devoir subir son discours.
Tant de monde, quand même, et tout ça pour moi.
-« Comment espérez-vous nous faire croire que vous fêtez vos soixante-quinze printemps ?
Vous en paraissez cinquante. »
-« Norbert vous n’êtes qu’un vieux bonimenteur et vous me décevez énormément, l’an passé vous me donniez la quarantaine. »
-« Véronique, acceptez de m’accompagner à Los Angeles. Vous feriez de moi un homme comblé. Je vous en prie. »
-« Et qu’irais-je donc faire en Amérique ? Après huit mois au Japon ?
Je vais être cruelle, mais si je parais cinquante ans, vous êtes décidément beaucoup trop vieux pour moi. Non, sérieusement marquis, je suis attendue à Madrid, vous le savez bien. Mais je vous promet de penser à vous.
Maintenant, si vous voulez bien m’excuser. »
Véronique se lève et tente de se frayer un chemin parmi les danseurs. C’est vrai que je suis un peu pompette. Quelle limace ce marquis.
Elle constate avec satisfaction que les lavabos sont vides. Elle se lave les mains puis rentre dans les toilettes. Quand elle en ressort, la première chose qu’elle voit c’est l’énorme révolver, ensuite les yeux de la fille. Puis sa gorge éclate.
La femme de ménage replace l’arme sous son tablier et s’accroupit. Elle sort de sa poche un minuscule appareil, semblable à une petite lampe et le glisse derrière l’oreille gauche de Véronique. Bip. Elle se redresse rapidement puis referme la porte sur la morte.
-« Joyeux anniversaire. »

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29/01/2012 00:06 michael couvreur
07/03/2013 02:58 fenX
Très bonne idée de scénario, les 3 scènes se complètent bien et posent des questions intéressantes et d'actualité.
Juste un détail : je trouve inutile d'annoncer le tarif à la fin de la deuxième scène, s’arrêter sur la question "et ça t'a coûté combien ?" est largement suffisant, ça montre bien que Martine se laisse convaincre et ça a plus d'impact d’arrêter la scène sur ce changement d'attitude plutôt que sur la réponse qui n'a en soi pas un grand intérêt.
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